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Comment va-t-on « décarboner » le transport maritime ?

Et la voile ne pourrait-elle pas apporter sa contribution ?

Parmi les différents concepts proposés ces dernières années, celui de Michelin semble avoir quelques atouts peut être décisifs.

Et parmi ses ambassadeurs, il y a Michel Desjoyeaux, qui présentera lui-même la chose au Grand Pavois de La Rochelle…

Sur les grands navires de commerce, ces ailes gonflables pourraient permettre d'économiser 10 à 20 % de carburant. Une image contenant texte, clipart

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Sur les grands navires de commerce, ces ailes gonflables pourraient permettre d’économiser 10 à 20 % de carburant. | MICHELIN / WISAMO

Sébastien MAINGUET.Modifié le 25/09/2022 à 09h41

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Une voile gonflable révolutionnaire sur le bateau de Michel Desjoyeaux et bientôt sur des cargos (ouest-france.fr)

Il y a quatre ans, dans notre numéro 571 de septembre 2018, on vous présentait une aile gonflable qui semblait très intelligemment conçue et qui s’appelait alors « IWS » (Inflated Wing Sail).

Elle avait été mise au point par Édouard Kessi et Laurent de Kalbermatten, deux pionniers du parapente (Édouard Kessi ayant par ailleurs été, à une époque plus récente, un pionnier des voiles en « composite souple » type 3Di ou DFi).

Depuis, ce concept d’aile gonflable a fait du chemin, puisque c’est le groupe Michelin qui s’occupe désormais de le porter sur les fonts baptismaux, sous l’appellation de « Wisamo » (Wing Sail Mobility), après que les deux inventeurs ont vendu leur brevet il y a environ un an.

Sur de grands navires de commerce, un tel dispositif pourrait permettre d’économiser de 10 à 20 % de fioul, selon les conditions.

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Édouard Kessi (à gauche) et Laurent de Kalbermatten (à droite) ont été des pionniers du parapente, et ils sont à l’origine de ce concept d’aile gonflable pour bateau.

Aujourd’hui, c’est Michelin qui assure le développement de l’aile Wisamo. | SÉBASTIEN MAINGUET

Le premier navire à en bénéficier sera le MN Pelican (ci-dessous), roulier porte-conteneurs de 154,50 mètres, armé par la Compagnie Maritime Nantaise et affrété par la Brittany Ferries pour des rotations entre Poole au Royaume-Uni et Bilbao en Espagne. Il va recevoir une aile Wisamo de 100 mètres carrés.

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Imaginez une aile gonflable de 100 mètres carrés sur ce roulier porte-conteneurs de la Compagnie Maritime Nantaise, baptisé MN Pelican…

On devrait voir cela bientôt dans le golfe de Gascogne ! | COMPAGNIE MARITIME NANTAISE

Mais il y a en fait un autre bateau – beaucoup plus petit – qui en est déjà équipé, et c’est celui de Michel Desjoyeaux.

Un Sense 43, monocoque de croisière construit par Bénéteau.

Et vous pourrez le voir au Grand Pavois !

Rendez-vous donc sur les pontons de La Rochelle, du 27 septembre au 2 octobre.

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Au premier plan, c’est le Sense 43 de Michel Desjoyeaux qui est représenté. Il a été le premier bateau à être équipé d’une aile Wisamo. | MICHELIN / WISAMO

Cette aile présente au moins trois avantages qui risquent (à notre avis) de s’avérer décisifs.

D’abord, elle est extrêmement simple à utiliser et à régler, parce qu’elle a un profil symétrique, et parce que son mât rétractable (qui est à l’intérieur de l’aile) se trouve juste au niveau du centre de poussée aérodynamique.

Ensuite, elle est affalable : la structure est maintenue en place par un gonflage à basse pression, et pour rétracter l’aile il suffit de la dégonfler tout en faisant descendre le mât télescopique.

Enfin, cette structure gonflable et relativement souple a des chances d’être fiable : les efforts exercés sont très réduits, surtout du fait que le mât se trouve au niveau du centre de poussée.

L’aile Wisamo se caractérise par son équilibre naturel et optimal…

La petite vidéo officielle de présentation est assez éclairante :

(À 4’22, on peut apercevoir Édouard Kessi et Laurent de Kalbermatten.

WISAMO: Engineered by Michelin and powered by wind | Michelin – YouTube

L’équipe qui travaille sur ce projet au sein du groupe Michelin comprend au total une trentaine de personnes, et elle va se doter d’une antenne nantaise, comme le précisait cet article de Presse Océan il y a quelques mois.

Une autre aile, pour la plaisance, avec un volet…

Les visiteurs du salon de Cannes ont pu découvrir un autre projet qui présente quelques similitudes avec celui de Michelin.

Mais si l’aile Wisamo est développée avant tout en vue d’équiper de grands navires de commerce, celle dont nous allons parler maintenant est conçue pour la (grande) plaisance.

Le premier bateau à en être doté sera le MODX 70, un luxueux catamaran de croisière de 21 mètres de long et 10 mètres de large, déplaçant a priori autour de 23 tonnes – ce qui est plutôt raisonnable pour la taille.

La vidéo de présentation est alléchante :

Discover the MODX 70 catamaran from all angles! – YouTube

Mise à l’eau prévue début juillet 2023.

La fameuse aile devrait être présentée officiellement au Salon du multicoque de La Grande Motte, en avril prochain, et si tout se passe comme prévu le bateau pourrait être exposé au prochain salon de Cannes.

La construction a déjà commencé au chantier lorientais Ocean Développement, qui a conçu ce grand cata de croisière en partenariat avec la toute jeune société Aeroforce, laquelle a développé les ailes (car il y en a deux !), et avec Madintec, spécialiste des pilotes automatiques haut de gamme pour la course au large, qui est ici chargé de l’automatisation des ailes.

Comme l’aile de Wisamo, celles du MODX 70 sont gonflables, et portées par un mât rétractable – ce qui permet de réduire le tirant d’air à 4,60 mètres !

Mais il y a aussi quelques différences notables.

D’abord, les ailes d’Aeroforce sont dotées d’un volet (comme on le voit sur la vidéo).

Ensuite, nous précise Franck David qui est le directeur du chantier, elles sont hermétiques.

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Il est possible d’ariser chacune des deux ailes, en réduisant leur surface de 40 %.

Si cela ne suffit pas, on peut n’en conserver qu’une seule.

Sans compter que d’une manière générale, avec une voile de type aile, il est aisé de réduire la puissance, en réduisant simplement l’angle d’incidence, et aussi en réduisant la cambrure puisque l’on dispose ici d’un volet.

Ce n’est pas comme une voile souple qui se met à faseyer…

Last but not least, il s’agit avec le MODX 70 d’atteindre une autonomie complète en termes de production d’énergie à bord, y compris pour la propulsion.

Les moteurs électriques seront alimentés par un parc de batteries de 230 kilowatts-heures, qui pourra se recharger à la fois avec les 70 mètres carrés (!) de panneaux solaires qui fournissent une puissance-crête de 15 kilowatts (!), et avec les hydrogénérateurs qui devraient aussi être efficaces puisque, souligne encore Franck David, « l’idée est d’atteindre très rapidement les 10 nœuds à la voile ». À suivre…

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