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Le voilier Raindancer a coulé le 13 mars dernier entre les Galápagos et les Marquises après une collision avec une baleine.
Ses passagers ont été sauvés grâce à un réseau de voiliers alertés et se servant des liaisons Starlink.
La balise de détresse EPIRB du bord ne semble pas avoir fonctionné, ce qui amène à se poser des questions…
Le voilier Raindancer. Installation d’une antenne Starlink. | D.R.
Jean-Luc GOURMELEN. Modifié le 19/03/2023 à 09h33
Un voilier coule après à une collision avec une baleine, l’équipage est sauvé grâce à Starlink (ouest-france.fr)SLETTER VOILES ET VOILIERS
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En ce 13 mars 2023, il fait beau dans l’Alizé du Sud-Est et Raindancer marche à 6 nœuds, alors qu’il reste 1 400 milles à courir sur les 3 100 entre les Galápagos et les Marquises.
L’équipage est constitué de 4 personnes : Rick (le propriétaire), sa compagne Alana et un couple d’équipiers (Bianca et Simon).
« Nous étions en train de déguster une pizza quand j’ai eu l’impression que nous nous étions pris une digue en béton.
« Nous avons touché une baleine ! » crie Alana, et en regardant sur bâbord, je vois une énorme baleine et du sang qui venait de son flanc alors qu’elle se met à sonder.
Je demande à tout le monde de vérifier les pompes et, 5 secondes après que l’alarme de la pompe principale se déclenche, je vois de l’eau envahir la cabine arrière.
Pendant que l’équipage commence à rassembler le matériel de sécurité, je vais chercher l’origine de l’entrée d’eau.
Position de Raindancer. | D.R.
À ce moment, soit 30 secondes après l’impact, les planchers commencent à flotter…
Et il est donc clair que Raindancer va couler.
Je remonte dans le cockpit et aide à mettre la survie à l’eau, déclenche une de nos balises EPIRB, et passe un MAYDAY sur la VHF pendant que la survie se gonfle comme il se doit.
C’est alors que je m’aperçois que les voiles sont toujours hissées, ce qui induit beaucoup de tension sur la survie que nous traînons.
Avec Bianca, nous amenons les voiles pendant que Simon met à l’eau l’annexe, qui était gonflée -et retournée- sur la plage avant.
Je mets des palmes et un masque, plonge sous la voûte arrière et m’aperçoit tout de suite de l’ampleur des dégâts, avec beaucoup de fissures et de déchirures sur la coque autour de la sortie de l’arbre d’hélice, et même sur le skeg.
J’essaie de les boucher avec une bâche, mais il y a trop de houle et Raindancer est déjà rempli aux 2/3.
Je saute dans la survie ou m’attends le reste de l’équipage, me retourne et vois les 3 derniers mètres du mât s’enfoncer dans l’océan…
Quand Alana remarque que nous sommes toujours amarrés à Raindancer !
Un coup de Leatherman, toujours dans ma poche, et nous nous retrouvons seuls au milieu du Pacifique.
Le soleil se couche rapidement, le vent monte et les poissons volants atterrissent régulièrement dans le dinghy alors que toutes les heures, nous émettons un Mayday avec notre VHF portable.
À 5 heures du matin le 14 mars, Simon aperçoit les feux du Rolling Stones (un catamaran de type Leopard 45) et nous avons tous crié en entendant la voix de son skipper, Geoff Stone, à la VHF.
J’envoie une fusée parachute et déclenche ma balise personnelle AIS, afin qu’il nous repère plus facilement.
Nous nous regroupons alors tous les 4 dans le dinghy et nous hissons un à un, via la jupe arrière, à bord de Rolling Stones. Ouf. Sauvés ! »
Message de Tommy Joyce, un ami de l’équipage du voilier coulé. | D.R.
Merci, Starlink !
Alors que l’équipage de Raindancer se trouvait réparti entre la survie et le dinghy (deux dans chaque), amarrés l’un à l’autre, Rick a utilisé son Iridium qui ne disposait plus que de 10 % de batterie, pour appeler un ami (Tommy Joyce, sur Southern Cross) qui était parti des Galápagos quelques jours plus tard et qui dispose d’un Starlink à bord.
Grâce à cette liaison satellitaire à haut débit, il crée un groupe WhatsApp et Facebook qui permet d’échanger instantanément avec d’autres voiliers qui se trouvent dans cette zone, notamment la flottille des participants au Rally World ARC, mais aussi avec la mère et le frère de Rick, ainsi qu’avec le MRCC du Pérou (en charge de la zone) et d’Alameda.
Et c’est grâce à cette communication efficace et rapide que le catamaran Rolling Stones, qui ne fait pas partie de l’ARC, que l’équipage de Raindancer a pu être sauvé au bout de dix heures.
Au début, Rick pensait que l’EPIRB qu’il avait déclenchée n’avait pas fonctionné, mais il s’est avéré que le signal avait bien été capté par le MRCC, comme les US Coast Guard l’ont confirmé, mais que son coup de fil à Tommy avait permis de communiquer beaucoup plus rapidement avec toutes les parties impliquées, et notamment les 10 voiliers de l’ARC.
Le MRCC Alameda avait aussi lancé une alerte AMVER – qui contacte les navires marchands sur zone – et le M/V Dong-A Maia était prêt à se détourner pour rejoindre la position du radeau de survie, mais il lui aurait fallu beaucoup plus de temps pour l’atteindre.
Raindancer. | D.R.
Tracking de l’ARC. | D.R.
Épilogue
Tout est bien qui finit bien, donc, puisque les 4 rescapés de Raindancer sont désormais en route vers les Marquises à bord de Rolling Stones, comme l’explique Rick : « Merci à la communauté des navigateurs d’avoir réagi si rapidement et efficacement à notre Mayday, à commencer par Geoff, notre sauveur.
C’est sûr, je suis triste d’avoir perdu mon bateau, qui était tout pour moi.
Mais le plus important, et de loin, reste que nous sommes en vie ».
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