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Jusqu’à présent, pour avoir du véritable haut débit au large (type Vsat, par satellite géostationnaire), il fallait être capable de débourser des sommes astronomiques, et les plaisanciers ordinaires devaient se contenter de connexions Iridium (satellites en orbite basse) ou Inmarsat (satellites géostationnaires) avec des débits très faibles.
Les choses pourraient changer avec l’arrivée des énormes constellations Starlink, OneWeb, Kuiper et autres, constituées de milliers de satellites.
Le service Starlink devrait bientôt couvrir toute la planète bleue, mais pas évident qu’au grand large ce soit le même prix qu’à terre… | SPACEX
Sébastien MAINGUET. Publié le 27/01/2023 à 07h32
On vous en parlait récemment : depuis quelque temps, outre-Atlantique, des plaisanciers testent sur leur bateau l’offre Starlink terrestre « véhicules de loisir », qui est également disponible en France, avec un abonnement à 135 dollars (ou 100 euros) par mois en illimité et une antenne assez compacte à 599 dollars (ou 450 euros).
Aux États-Unis (pas en France), une autre antenne est disponible qui offre de meilleures performances quand le véhicule est en mouvement, mais le prix n’est pas le même : 2500 dollars au lieu de 599 (avec toujours l’abonnement à 135 dollars par mois).
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Il semble que ce Starlink terrestre ne fonctionne pas trop mal en mer, même avec l’antenne standard, et même quand on s’éloigne un peu des côtes – alors qu’en principe, la zone de couverture ne couvre pas du tout l’espace maritime, voir cette carte…
Cependant tout n’est pas clair du côté des conditions générales de vente : a priori, elles ne sont pas adaptées au bateau…
Affaire à suivre, donc, sur les groupes Facebook « Starlink On Boats » et « Starlink for sailboats ».
On y teste essentiellement l’offre « véhicules [terrestres] de loisir », le plus souvent avec l’antenne standard à 599 dollars (voir sur ce fil) ; et aussi parfois l’offre résidentielle standard qui existait avant ; bien plus rarement l’offre maritime qui s’adresse à un public bien plus restreint comme nous allons le voir tout de suite.
Car oui, il existe bien une offre Starlink maritime spécifique. Elle est juste beaucoup, beaucoup plus chère, et n’était jusqu’ici disponible qu’aux États-Unis, avec une couverture encore limitée (carte ci-dessous, à retrouver en grand ici sur le site de Starlink).
À la différence du Starlink terrestre, le système est censé fonctionner pour des bateaux très rapides (y compris donc pour des voiliers de course au large), mais cette fois il faut deux antennes…
À 5000 dollars pièce. Le prix des données est encore plus radicalement différent puisque c’est 5000 dollars par mois …
Avec 5 To (téraoctets) d’accès prioritaire au réseau, et le reste en illimité, mais on ne va pas chipoter…
Dans tous les cas, quelle que soit l’offre choisie, Starlink, c’est du véritable haut débit : environ 50 ou 100 Mbps (en download), soit 50000 ou 100000 kbps, c’est donc environ 500 ou 1000 fois plus rapide que l’Iridium GO Exec ou Certus 100, ou que l’Inmarsat Fleet Broadband 150… Rien à voir !
En termes de débit, cela se compare plutôt au Vsat diffusé par les satellites géostationnaires.
Mais la constellation Starlink, ce sont des milliers (et peut-être bientôt des dizaines de milliers !) de satellites défilants, en orbite basse ; et alors que pour avoir du Vsat au large, il faut une antenne très lourde, encombrante et coûteuse (jusqu’à plus d’un mètre de diamètre, et plusieurs dizaines de milliers d’euros !), l’antenne Starlink maritime est bien plus compacte et légère, et aussi moins chère – et ce, là encore, quelle que soit l’offre choisie.
(Sur ces sujets, voir aussi le numéro 607 du magazine Voiles et Voiliers, septembre 2021 : sommaire ici, à commander sur notre boutique en ligne.)
Le fait d’avoir des satellites à basse altitude (550 kilomètres) permet aussi de réduire le temps de latence, par rapport à des satellites géostationnaires qui sont nécessairement très hauts, à 35786 kilomètres – il n’y a pas le choix : c’est l’orbite géostationnaire, dans le plan équatorial, avec une période orbitale égale à la période de rotation de la Terre (en outre, vu leur position, ces satellites ne peuvent pas correctement couvrir les régions polaires au-delà d’une certaine latitude).
Au large, quand on se trouve loin de toute station à terre, le problème du temps de latence est un peu plus délicat, puisqu’il faut faire ce qu’on appelle du « cross-linking », c’est-à-dire qu’il faut être capable de transférer les données d’un satellite à l’autre.
Mais a priori c’est toujours moins long que de faire un seul aller-retour vers un satellite géostationnaire.
Quoi qu’il en soit, il ne semble pas que, chez Starlink, on veuille – ou on puisse ? – pour l’instant renverser la table en proposant les 50 ou 100 Mbps à 135 $/mois comme dans l’offre terrestre.
Soyons clairs : si Starlink voulait ou pouvait faire cela, Iridium et Inmarsat seraient immédiatement obsolètes.
Il faut noter aussi que depuis la signature, fin 2022, d’un accord entre l’opérateur français Eutelsat (spécialiste du Vsat géostationnaire) et le britannique OneWeb (un concurrent de Starlink sur le marché du web en orbite basse), le tonitruant Elon Musk (patron de SpaceX qui déploie la constellation Starlink) ne jouit plus tout à fait de la même position de force dans le domaine du web spatial.
Il a encore une petite avance, certes, mais il y a aussi le projet Kuiper d’Amazon, sans parler du projet européen… dont le commissaire Thierry Breton craint d’ailleurs qu’il reste coincé quelque temps dans les limbes suite à l’accord Eutelsat/OneWeb… On verra…
L’offre maritime spécifique de Starlink : les zones couvertes pour l’instant apparaissent en bleu clair.
Pour le bleu plus foncé (Atlantique Nord et autres), c’était prévu fin 2022 ou début 2023 (comme l’indique la légende), mais il faudra peut-être attendre encore un peu… | STARLINK
En attendant, IEC Telecom Europe, désormais distributeur officiel Starlink pour la France, lance des offres Starlink maritime adaptées aux équipes de course au large professionnelles et à la grande plaisance.
Chez ce fournisseur d’accès, on espère bien que l’Atlantique Nord sera couvert d’ici fin 2023, pour la transat Jacques Vabre…
D’après Francis Fustier, qui est l’auteur de ce petit livre très précieux intitulé « Naviguer avec une tablette numérique et un smartphone » (voir cette présentation), il est sans doute un peu « prématuré » de vanter les mérites de Starlink pour la plaisance.
« Les services ne sont pas encore réellement définis, la couverture est encore incomplète (Atlantique, Pacifique), des mises à jour système apportent encore des modifications.
On lit bien dans les forums que les premiers acquéreurs servent avant tout de bêta-testeurs de la qualité des services.
Ça fait du buzz… Au rythme d’envoi des satellites, cependant, il est probable que le réseau et les services seront plus stables au deuxième semestre 2023. »
Et pourtant ce site non officiel (à consulter sur un ordinateur) semble quand même indiquer qu’une bonne partie de l’Atlantique et du Pacifique sont déjà couverts… Pas facile à suivre !
Nous pouvons enfin vous recommander, sur le blog Sailing Awen (en anglais), une bonne présentation des quatre offres Starlink aujourd’hui disponibles (résidentiel, véhicules de loisir avec antenne standard ou antenne haut de gamme, et maritime), avec les tarifs et aussi les caractéristiques techniques (débit descendant et montant, etc.).
On notera au passage que les antennes consomment un peu de puissance électrique.
Lexique : bit (b), octet (o), byte (B), ne les confondez plus
Les capacités de stockage, pour un disque dur par exemple, sont données en octets (o) ou plutôt en kilooctets (ko), mégaoctets (Mo), gigaoctets (Go) ou téraoctets (To).
Mais pour les débits (capacité de la « bande passante » ou « vitesse de transfert »), on parle en bits (b) ou plutôt en kilobits (kb), mégabits (Mb) ou gigabits (Gb).
Et comme c’est un débit par seconde on ajoute « ps » ou « /s » à la fin : kbps ou kb/s (kilobits par seconde), Mbps ou Mb/s (mégabits par seconde), Gbps ou Gb/s (gigabits par seconde).
Attention, le terme anglais « byte » (B majuscule) que l’on trouve parfois désigne un octet (o) et non pas un bit (b minuscule).
Mais de quel débit a-t-on besoin pour aller sur internet ?
Avec un service Iridium GO, par exemple, à 2 kb/s, c’est bien trop juste.
Le terminal Iridium GO n’est d’ailleurs pas fait pour cela, mais pour échanger simplement du texte, et aussi (surtout) pour télécharger des fichiers météo de taille raisonnable.
Pour charger une page web à une vitesse acceptable, il faut arriver à une centaine de kilobits par seconde (kb/s).
Et pour cela, aujourd’hui, il faut se tourner vers les services « Fleet » d’Inmarsat ou « Certus » d’Iridium.