Sauf repreneur, le Tour Voile (ex-Tour de France à la Voile) n’aura probablement pas lieu cette année.
Comme révélé par nos confrères de Tip & Shaft, l’organisateur Normandie Événements jette l’éponge pour l’édition 2022 faute d’avoir trouvé un partenaire-titre pour assurer l’équilibre budgétaire.
Voiles et Voiliers a voulu en savoir plus auprès de Thibault Parent, directeur du Tour Voile 2021.
Thibault Parent était directeur du Tour Voile 2021. | JEAN-MARIE LIOT
Olivier BOURBON. Publié le 13/01/2022 à 07h02
Voiles et Voiliers : Tout d’abord quel bilan avez-vous tiré de l’édition 2021 du Tour Voile ?
Thibault Parent : Nous étions très satisfaits. Nous avions des bons retours des équipages et des territoires.
On sentait un véritable engouement autour de notre projet.
On avait repris l’événement tardivement, en février 2021, et le timing était donc très serré pour une organisation en juillet. Mais nous avons réussi à relever ce challenge qu’on savait difficile.
Les signaux étaient donc plutôt au vert si ce n’est le bilan financier qui a été assez lourd.
On avait anticipé une perte mais elle a été plus conséquente que prévu.
On ne pouvait pas se permettre de mettre en péril notre société avec une deuxième édition déficitaire
Voiles et Voiliers : Le Tour Voile 2021 a été marqué par des nouveautés intéressantes mais aussi par un plateau un peu « maigre », avec seulement 10 équipages au départ…
Thibault Parent : Au cœur de notre projet de reprise, il y avait le retour des étapes de ralliement et un final sous forme de match-race sur le lac de Serre-Ponçon.
Ces deux nouveautés ont été des réussites et nous pensions continuer sur cette lignée et inscrire cela dans la durée.
Concernant le plateau, il est vrai qu’il n’était pas très fourni mais cela s’explique facilement : quand nous avons annoncé la reprise du Tour, il restait un peu moins de cinq mois aux équipages pour monter leurs projets, ce qui est très court.
Par ailleurs, après l’annulation du Tour Voile en 2020, certaines équipes s’étaient orientées vers d’autres supports et d’autres circuits pour 2021.
Au final, nous avons réuni dix équipages pour le Tour Voile 2021 mais ce n’était pas l’essentiel.
Le plus important était que le Tour puisse avoir lieu, qu’il ne s’éteigne pas complètement.
Même avec 10 bateaux, il y a eu des belles batailles sur l’eau. Notre objectif pour 2022 était d’étoffer le plateau et de réunir 15 à 20 équipages.
L’étape finale sur le lac de Serre-Ponçon a été l’une des belles réussites de l’édition 2021. | JEAN-MARIE LIOT
Voiles et Voiliers : Vous étiez donc en ordre de marche pour organiser l’événement une deuxième fois en 2022 ?
Thibault Parent : Oui, tout était lancé pour l’édition 2022. Le parcours était quasiment bouclé.
Nous étions présents à la Transat Jacques Vabre et au salon nautique de Paris.
Nous avons essayé jusqu’au bout de produire une nouvelle édition mais il a finalement fallu se résoudre et prendre la décision de ne pas organiser le Tour en 2022.
Nous avons préféré arrêter les frais avant qu’il ne soit trop tard.
La décision a été difficile à prendre mais nous n’avions plus le choix
Voiles et Voiliers : C’est au niveau financier que cela a coincé. Il fallait impérativement trouver un partenaire-titre pour assurer une certaine stabilité ?
Thibault Parent : Exactement, le Tour Voile ne peut fonctionner qu’avec un partenaire-titre pour le rentabiliser.
C’est absolument nécessaire pour arriver à l’équilibre financier et organiser l’événement dans des bonnes conditions.
Nous recherchions un partenariat à hauteur de 400 000 euros pour compléter le budget apporté par les territoires et les équipages.
Le partenaire aurait pu associer son nom à celui du Tour Voile. Mais nous n’avons pas réussi à le trouver.
Il était impossible de se projeter sans garantie financière.
On ne pouvait pas se permettre de mettre en péril notre société avec une deuxième édition déficitaire.
Nous avons préféré arrêter les frais avant qu’il ne soit trop tard.
La décision a été difficile à prendre mais nous n’avions plus le choix. On a préféré l’annoncer en décembre plutôt qu’en mai.
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Voiles et Voiliers : Selon vous, pourquoi est-il si difficile de trouver un partenaire-titre ? Pourquoi les entreprises ne se lancent pas ?
Thibault Parent : L’événement plaît, c’est une certitude, et nous portions un projet clair et lisible.
Nous avons eu des contacts avec des partenaires potentiels mais ils n’ont pas abouti.
Le contexte de crise sanitaire n’a pas aidé. Il n’est pas facile pour les entreprises de se projeter vers l’avenir.
Le Tour Voile a pu être « sauvé » en 2021 mais il est peu probable qu’il ait lieu en 2022. | JEAN-MARIE LIOT
Nous retirons une certaine fierté d’avoir fait en sorte que l’épreuve puisse se tenir en 2021 et qu’elle ne soit pas annulée deux fois de suite
Voiles et Voiliers : Vous avez le sentiment d’avoir tout tenté, vous n’avez pas de regrets ?
Thibault Parent : Absolument aucun regret, nous avons énormément appris. On croyait dans le projet mais il n’était pas viable pour notre société.
On savait que c’était une prise de risque financière mais aussi une opportunité intéressante.
On a repris l’événement avec beaucoup d’humilité et cet arrêt prématuré est forcément décevant.
Mais nous retirons aussi une certaine fierté d’avoir fait en sorte que l’épreuve puisse se tenir en 2021 et qu’elle ne soit pas annulée deux fois de suite.
Désormais, c’est aux prochains repreneurs potentiels de se manifester
Voiles et Voiliers : Vous êtes désormais désengagés du Tour Voile mais avec votre expérience, comment voyez-vous l’avenir de l’épreuve* ?
Thibault Parent : Je suis persuadé que le Tour aura lieu à nouveau, en 2022 ou plus tard.
Il a une place singulière dans le calendrier nautique, notamment pour la formation de la jeunesse.
Je souhaite qu’il puisse se tenir le plus rapidement possible. Nous sommes effectivement sortis de cette organisation.
Désormais, c’est aux prochains repreneurs potentiels de se manifester.
* ASO reste propriétaire de la marque Tour Voile mais n’a pas l’intention de reprendre l’organisation de l’événement.