Publié le 23/02/2022
La prévention de la mort subite par le biais des défibrillateurs automatiques implantables (DAI) remonte à l’étude MADIT qui date de plus d’un quart de siècle.
C’est dans le post-infarctus du myocarde que leur efficacité a été établie, avant que ne soient définies des indications sélectives, en premier lieu la cardiopathie ischémique, devant la cardiomyopathie dilatée et les autres cardiopathies, en fonction de l’état clinique (classe NYHA), de la stratification du risque et les valeurs de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) en règle < 35 %.
Si le nombre de DAI implantés en France en 2019 s’est élevé à 16 000, force est de reconnaître que leurs indications tendent à se restreindre depuis la publication de l’étude randomisée DANISH en 2016 : l’absence d’effet des DAI sur la mortalité globale au terme d’un suivi médian de 5,6 années avait alerté sur un rapport bénéfice/risque plus qu’incertain dans la cardiopathie non ischémique en dépit d’un dysfonctionnement ventriculaire gauche (FEVG <35 %).
Les patients les moins âgés (≤70 ans) faisaient quelque peu exception.
Extension du suivi de DANISH à 10 ans
Un suivi additionnel de quatre années fait l’objet d’une mise à jour publiée en ligne dans Circulation.
Les patients initialement inclus dans l’essai et répartis dans deux groupes (DAI versus traitement standard) ont été suivis jusqu’au 18 mai 2020, ce qui conduit de fait à un suivi médian de 9,5 années (25e–75e percentile, 7,9–10,9).
Dans le groupe DAI (n=556), le nombre de décès s’est élevé à 208 (37 %) contre 226 (40 %) dans le groupe contrôle.
La mortalité globale à très long terme a donc été identique dans les deux groupes.
Cependant, chez les patients âgés au maximum de 70 ans (n = 829), la mortalité globale a été un peu plus faible dans le groupe DAI, soit 30 % versus 36 % dans le groupe contrôle, (Hazard Ratio HR, de 0,78 [intervalle de confiance à 95 % IC 95%, 0,61–0,99] ; p = 0,04). Après 70 ans (n = 287), aucune différence intergroupe significative n’apparaît quant à la mortalité globale.
Moindre mortalité globale et cardiovasculaire en dessous de 70 ans
La même tendance a été observée pour la mortalité cardiovasculaire, la différence intergroupe au-dessous de 70 ans et au-dessus étant du même ordre, soit 22 % versus 28 % (HR, 0,75 [IC 95%, 0,57–0,98] ; p= 0,04).
La fréquence de la mort subite cardiovasculaire a été globalement plus faible dans le groupe DAI, de 6 % contre 10 % (HR, 0,60 [IC 95%, 0,40–0,92] ; p= 0,02) mais ceci concerne surtout les patients d’âge ≤ 70 ans : 5 % versus 11 % (HR, 0,42 [IC 95%, 0,24–0,71] ; p = 0,0008).
Cette différence intergroupe n’est en effet pas retrouvée chez les patients après 70 ans (10 % versus 7 % ; HR, 1,34 [IC 95%, 0,56–3,19]; p= 0,39).
Cette extension de l’essai randomisé DANISH dans le temps avec un suivi médian proche de dix années confirme la tendance initiale. En cas de dysfonctionnement systolique ventriculaire gauche sévère sans cardiopathie ischémique sous-jacente, les DAI n’influent pas sur la mortalité globale à long terme.
Cependant, chez les patients âgés de 70 ans ou moins, le bénéfice est modeste mais réel et se traduit par une diminution de la mortalité aussi bien globale que cardiovasculaire, mais aussi par une moindre incidence de la mort subite d’origine cardiovasculaire.
Difficile de récuser l’indication d’un DAI dans ces cas précis…
Dr Catherine Watkins
RÉFÉRENCE: Yafasova A et coll. : Long-Term Follow-Up of DANISH (The Danish Study to Assess the Efficacy of ICDs in Patients With Nonischemic Systolic Heart Failure on Mortality. Circulation 2022;145:427–436.doi.org/10.1161/CIRCULATIONAHA.121.056072Circulation.
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