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La dixième discipline olympique qui devait être la course au large en double mixte sur un voilier habitable de 30 pieds, pourtant largement approuvée par World Sailing, a du plomb dans l’aile, ce que le milieu craignait !

Quelques réfractaires dont le très influent vice-président du CIO Ser Miang, font tout pour conserver le Finn au détriment de la course au large. Suite de notre enquête.

La course au large à Marseille en 2024 – ici un L30 – est loin de faire l’unanimité au sein du CIO. | FFVOILE

Didier RAVON.Publié le 19/04/2021 à 18h03

La révélation dans nos colonnes d’un courrier du CIO à World Sailing, repris et cité par plusieurs médias, a manifestement poussé la fédération internationale à réagir vite… car ce qui a été révélé, devait théoriquement rester confidentiel quant à la décision définitive concernant la dixième discipline olympique lors des Jeux de Paris 2024…

Selon une source « proche du dossier », lors d’une réunion animée le 15 avril par David Graham, le directeur général de World Sailing, les débats ont été ouverts par le récent président chinois Quanthai Li, qui manifestement depuis son élection, ne semble guère peser sur les décisions.

Selon David Graham, « la course au large à Marseille n’est pas morte, mais le CIO (Comité International Olympique) demande à World Sailing de proposer des alternatives. »

S’il se confirme que la course au large est supprimée, il se pourrait que tout simplement, elle ne soit même pas remplacée…

Plutôt que dire non tout de suite – manifestement un grand classique au CIO – ce dernier laisse planer un mince espoir… mais au final aurait plus ou moins pris sa décision.

« Pour moi, c’est un enterrement de première classe, élégant sur la forme, pas sur le fond » résume notre interlocuteur, qui préfère garder l’anonymat.

« Oser prétendre que la sécurité en mer est un problème, est juste débile !

S’il est un endroit les mieux surveillés de toutes les mers de la planète, c’est bien la Méditerranée !

Difficile de faire plus safe. »

Si neuf disciplines sont théoriquement et a priori avalisées pour Marseille, World Sailing doit donc proposer un nouveau projet pour la dixième médaille, car s’il se confirme que la course au large est supprimée, il se pourrait que tout simplement, elle ne soit même pas remplacée.

Sachant que la tendance actuelle est de limiter le nombre d’athlètes, et de fait les coûts, ce risque est bien là.

Bref, tout cela ressemble à une menace polie de la part du CIO.

La planche à foil (iQFOIL) va remplacer la RS : X. | JESUS RENEDO

« C’est langue de bois et politique à fond! tempête notre informateur, car il faut respecter la mixité et l’universalité, et en même temps que l’événement a fait ses preuves dans un championnat du monde… »

L’on a envie d’ajouter que de parler de « faire » ses preuves dans un grand championnat alors que le bateau n’a même pas encore été choisi, est un peu fort de café…

De plus, des départs de course au large, il y en a presque tous les week-ends sur nos côtes et ailleurs… moins en ce moment il est vrai avec la Covid.

Mais s’il est un pays où l’on sait faire c’est bien ici (Route du Rhum, Vendée Globe, Transat Jacques Vabre, Figaro…).

Donc, la fédération internationale se doit de proposer rapidement d’autres solutions.

Une possible nouvelle discipline mixte, pourrait même être une course en équipe sur deux solitaires monotypes avec une femme et un homme, des poules avec éliminatoires directes, et pourquoi pas du match racing au final (il a eu lieu pour la dernière fois en 2012 à Londres sur le petit quillard Elliot pour les femmes, mais n’a pas été reconduit à Rio quatre ans plus tard).

Autre question de World Sailing au CIO : afin d’avoir cette dixième médaille, est-il possible de « dédoublonner » des séries (le 470 sera mixte pour 2024), en réintégrant comme c’est encore le cas pour ces JO de Tokyo, 470 hommes et 470 femmes ?

Selon d’autres sources, ce pourrait bien être une solution (étrange ?), compromettant celles et ceux qui ont décidé d’attaquer une préparation olympique en double mixte sur le célèbre plan Cornu.

Le 470 qui doit devenir mixte pour les JO de 2024, pourrait redevenir série masculine et féminine. | DIDIER RAVON

Le vénérable Finn doit rester à la place de ces habitables n’ayant rien à faire aux Jeux

De toute évidence, celui qui suit le dossier au CIO, possède une forte influence, et ne s’est jamais caché qu’il est un ardent défenseur du Finn notamment.

De là à parler de chantage, afin de réintégrer le solitaire, olympique depuis 1952, il n’y a qu’un pas.

Il se nomme Ser Miang et est Singapourien.

À 72 ans, cet homme d’affaires et diplomate, ancien vice-président de World Sailing, est actuellement vice-président du CIO.

Il rêve de prendre la barre de l’institution basée en Suisse, mais s’est cassé les dents lors de la dernière élection. N’empêche, il n’est de secret pour personne dans le petit milieu olympique, que c’est lui qui « démonte » la course au large, affirmant que le vénérable Finn doit rester à la place de ces habitables n’ayant rien à faire aux Jeux.

Il rêve même que le célèbre solitaire ayant vu Paul Elvström ou Ben Ainslie plus que briller, revienne aux JO de 2028 à Los Angeles si jamais, il n’était pas réintégré à Marseille.

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Le Singapourien Ser Miang milite contre l’arrivée de la course au large mixte. | CIO

Il a fait le forcing auprès des nations asiatiques et des pays de l’Est notamment, dont on sait que la course au large est quasi inexistante, fait un lobbying d’enfer, et il paraît « parle à l’oreille » de l’Allemand Thomas Bach, le boss du CIO, pas spécialement porté sur la voile.

Bref, comme dit un marin réputé, qui lui non plus ne veut pas être cité, « pour moi c’est mort pour la course au large, mais quel dommage ! ».

« On pourrait aussi imaginer une épreuve en tandem avec le Finn pour les hommes et un Moth à foils (OneFly ?) pour les femmes, les gladiateurs se bagarrant à coup de pumping d’un côté et les abeilles volantes de l’autre, le meilleur duo au classement cumulé remportant l’or olympique » dit à juste titre un ancien champion du monde.

Le Finn olympique depuis 1952, n’a pas dit son dernier mot. | RICHARD LANGDON/SAILING ENERGY/WORLD SAILING

Bien que plus président de la FFVoile, battu par Jean-Luc Denéchau il y a quelques semaines, Nicolas Hénard qui a porté à bout de bras la course au large aux JO 2024, ne « lâche pas le morceau ».

Il a notamment appelé Michel Desjoyeaux, François Gabart, Thomas Coville… pour qu’ils pèsent sur la course au large aux JO.

« On a besoin de ces marins emblématiques. Il nous reste des cartes à jouer » explique l’ancien double champion olympique de Tornado qui compte bien aussi sur l’influence du Président de la République Emmanuel Macron (il s’est rendu à Marseille il y a deux ans au Roucas Blanc, site des futurs JO, n’est manifestement pas insensible la voile, et a suivi le dernier Vendée Globe avec intérêt – notamment ce fameux appel à Jean Le Cam après le sauvetage de Kevin Escoffier…) outre ses nombreux contacts à Matignon et au Ministère des sports avec l’ancienne championne de natation Roxana Maracineanu…

Et d’ajouter, qu’il espère que le nouveau président de la FFVoile, pour l’instant plutôt discret sur le sujet, se positionne.

Le CIO affirme avoir des réticences quant à la sécurité au large de Marseille. | FFVOILE

La course au large reste notre premier choix pour Paris 2024

Et le COJO (en charge de l’organisation des JO de 2024) dans tout ça ?

« Ils sont obligés de rester neutres vis-à-vis du CIO, sous peine de se faire défoncer » nous dit sans ambages un régatier de haut niveau toujours sous couvert d’anonymat, connaissant manifestement très bien les rouages et l’importance de l’aspect politique quant aux décisions du puissant Comité Olympique, basé à Lausanne.

« La course au large reste notre premier choix pour Paris 2024 » conclue David Graham.

On croise les doigts pour qu’il ait gain de cause.

« Les solutions alternatives seront discutées les 10 et 11 mai puis soumises au vote le 14 lors d’une réunion du Council, avant de les soumettre au CIO dernier carat le 26 mai. »

Réponse le 8 juin, a priori.

Mais l’avenir olympique de la course au large est plus que jamais dans les mains du CIO…

JEUX OLYMPIQUES WORLD SAILING COURSE EN DOUBLE

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JO Paris-2024 : 6 semaines pour présenter au CIO une alternative à la course au large

16 avril 2021

World Sailing a jusqu’au 26 mai pour présenter au CIO une alternative à la course au large alors que l’enjeu pour la fédération internationale est désormais tout simplement de sauver sa 10e épreuve dans le programme des JO de Paris-2024.

« La course au large n’a pas été officiellement refusée par la CIO même s’il apparaît clairement qu’il sera difficile d’aller de l’avant » : le Polonais Tomasz Chamera, l’un des vice-présidents de World Sailing a été on ne peut plus clair vendredi après-midi, lors d’un point presse en visioconférence, à l’issue d’une réunion du Conseil de World Sailing.

Les fortes réserves posées par le CIO sur la course au large, dans un courrier adressé le 12 avril à la fédération internationale de voile, ne sont certes pas un rejet définitif de l’épreuve qui devait se tenir à Marseille lors des JO de 2024, mais en demandant à World Sailing de lui présenter une ou des solutions alternatives, l’instance basée à Lausanne lui fait poliment comprendre qu’il vaut mieux l’oublier.

Dans cette lettre, le CIO s’inquiète ainsi des risques pour « la sécurité de la course » et des équipages, « des coûts de production télévisée et de la complexité de la couverture » d’une course de trois jours au large et de l’absence de Championnat de monde qualificatif.

Autant de prétextes régulièrement soulevés par les opposants à l’arrivée de cette nouvelle épreuve, pourtant validée par World Sailing.

Parmi les opposants figure le Singapourien Ser Miang, adversaire de longue date de l’ex-président de World Sailing, le Danois Kim Andersen, battu par Quanhai Li, et lui aussi favorable à un statu quo dans le programme olympique.

Très influent au sein du CIO, dont il est membre, notamment auprès du président allemand Thomas Bach, Ser Miang a porté la voix des pays asiatiques, d’Europe de l’Est et des pays émergents, qui avaient milité pour un maintien de la planche RS : X ou du Finn, rayés du programme des JO-2024, au profit notamment de la course au large.

Vendredi, le directeur général de World Sailing, David Graham, s’est dit « très déçu » rappelant que la course au large avait été « adoptée démocratiquement ».

« Ce n’est pas une décision officielle du CIO, il s’agit plutôt d’une direction à suivre afin d’aider World Sailing a sécuriser la 10e médaille aux JO de Paris-2024, dans le cas où la course au large ne serait pas adoptée par la Commission exécutive (du CIO) début juin », a-t-il ajouté.

La course au large “ reste notre premier choix pour Paris 2024 »., a encore ajouté M. Graham. Pour autant, il va désormais falloir à la fédération internationale proposer une ou des solutions alternatives, qui seront discutées les 10 et 11 mai puis soumises au vote le 14 mai lors d’une réunion du Conseil.

Ce qui permettra de soumettre les propositions au CIO avant la date butoir du 26 mai.

Pour le DG de World Sailing, il existe « une possibilité » réelle que la voile perde cette 10e épreuve lors des JO de Paris 2024, alors que les quotas de sportifs engagés ont déjà diminué.

Parmi les alternatives figure la possibilité de dédoubler les épreuves de kitersuf ou de 470 ou de maintenir le Finn, série historique de la voile olympique qui sera encore présente aux JO de Tokyo cet été mais a été supprimé du programme des JO de Paris-2024.

Cette épreuve alternative doit répondre aux critères posés par le CIO, notamment la parité hommes/femmes, l’universalité ou encore l’innovation, autant de critères auxquels la course au large répondait pourtant parfaitement.

Le CIO se prononcera définitivement le 8 juin.

En France, ceux qui ont défendu l’introduction de la course au large en 2024 veulent encore s’accrocher à un dernier espoir.

Après les garanties apportées au CIO en février par la ministre déléguée aux Sports, Roxana Maracineanu, ils appellent maintenant à une intervention directe du président Emmanuel Macron auprès du président du CIO Thomas Bach.

Et veulent mobiliser les grands noms de la course au large.

Interrogé jeudi par Courseaularge, Paris 2024 de son côté n’a pas officiellement réagi et ne devrait pas le faire dans l’immédiat dans la mesure où la décision appartient au CIO et à World Sailing.